Croisière en gabarot - été 2003
par Jean-Bernard Forie
Photos : Jean-Bernard Forie
Dimanche 27 juillet 2003
Je n’émerge véritablement que vers huit heures du matin, un peu avant l’heure de la pleine mer. Le temps a changé : le ciel est gris et il n’y a pas beaucoup de vent.
Le voyage reprend, je passe sous le dernier pont puis vogue vers Ambès. Une cavalcade de nuages noirs vient pimenter la navigation. La brise fraîchit et je choisis de jeter l'ancre sous le vent de la berge, où je prends promptement un ris. Plus loin, devant Bourg-sur-Gironde, il faut négocier un grain de vent et de pluie, mais tout cela n’est pas bien méchant et déjà les nuages se dispersent et le beau temps revient.
La belle lumière d’après la pluie baigne le paysage du bec d’Ambès. D’après mes calculs, j’ai de bonnes chances d’atteindre Pauillac avec cette marée et, pour bénéficier du courant favorable là où il est le plus fort, je passe par le grand chenal de navigation qui longe le Médoc.
Vers treize heures, il devient évident que le retour du flot me fait faire du sur-place. Je dois me résoudre à m’ancrer près de la berge, entre deux cabanes de pêche au carrelet, pour laisser passer la marée montante.
L’après-midi s’écoule ainsi, à tanguer et à rouler au mouillage, à embarder dans les rafales de la vigoureuse brise d’après-midi, à somnoler sur mes sacs étanches, un pli de la voile tiré sur la figure pour échapper à la morsure du soleil. Ces heures immobiles sont aussi des heures de voyage ! Et puis il y a tant à voir sur l’eau...
Avec le retour du descendant, en fin d’après-midi, je me hâte vers Saint-Estèphe, La Maréchale, Saint-Christoly-du-Médoc. Le vent faiblit avec le soir, mais ce n’est pas désagréable. Je continue de louvoyer au coucher du soleil, puis la nuit venue, vers 23h, quelque part sur la rive du Médoc, je jette l’ancre dans quelques centimètres d’eau, le long d’un banc de sable, et prépare mon dîner, bercé par la plainte douce et obsédante du ressac.
